PHOTO: FLORENCEK.COM

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C’est mercredi dernier lors de son passage à Québec, que j’ai eu la chance de m’entretenir avec l’artiste Florence K. Une rencontre en toute intimité, dans la chaleureuse vitrine du Café « Ma Station » de la rue St-Vallier.

Je lui ai proposé une entrevue portant sur divers sujets envers lesquels j’aimerais connaître ses idées, ses opinions…. Proposition qu’elle a gentiment acceptée.

Florence & les voyages….

Comment les voyages t’ont-ils fait grandir, autant comme femme que comme artiste?

« Les voyages…. Ça a tout fait. Ça m’a apporté une perspective tellement différente sur le monde. Ça m’a permis de découvrir des trucs incroyables, de développer un intérêt pour l’apprentissage des langues, de m’ouvrir à la musique étrangère, de comprendre l’histoire d’autres peuples que le nôtre. Plus jeune, j’avais de la difficulté à retrouver mes propres racines quand je revenais à la maison…. Tout me paraissait insipide comparativement à ce que je vivais à l’étranger. Pourtant ce n’était pas insipide…. Mais j’avais de la misère à apprécier le quotidien.

J’ai la chance de pratiquer un métier où je suis appelée à voyager et je suis contente de le faire, car ça me nourrit, ça m’inspire. »
Florence & les racines….

Est-ce que le fait de voyager beaucoup selon toi, peut engendrer des difficultés à s’enraciner, à se trouver une zone de confort dans le quotidien et dans la routine?

« J’ai trouvé mes racines chez moi. Je ne ressens plus le besoin aussi fort de partir à l’étranger pour être bien. Ça me fait du bien de partir, mais être mère fait en sorte que j’ai voulu créer un environnement de routine…. Parce que moi ça m’a manqué dans ma vie. Puis moi, à travers la routine de ma fille, je me suis trouvé ma propre routine et je m’y sens bien. Je suis contente de rentrer à la maison.

J’ai également trouvé beaucoup de racines dans l’écriture, parce que c’est une « base » pour moi écrire. Une base à laquelle je peux revenir n’importe quand, à n’importe quel moment de la journée, peu importe où je me trouve….»

As-tu l’impression que l’écriture te permet de te poser, de déposer quelque chose?

« Oui. Ça me « ground » vraiment d’écrire. »

 

Florence & le minimalisme….

« La purge que j’ai faite des choses matérielles, y’a pas de mots! J’aime mieux vivre des « moments » que de m’entourer d’objets. Ça m’angoisse des objets partout! J’habitais dans un endroit beaucoup plus grand avant et j’avais l’impression de toujours être en train de ramasser, d’organiser. Je ressens une liberté beaucoup plus grande maintenant que j’habite dans un endroit plus petit. Je m’y sens bien, je m’y sens comme dans un nid. Puis, à travers cette liberté et cette légèreté-là, je me suis trouvé des racines aussi.

D’avoir la corde au cou parce qu’on a trop de biens matériels…. C’est épouvantable! C’est un peu comme vivre dans une cage dorée. »
Florence & la santé mentale….

Le fait de parler aussi honnêtement, ouvertement de ton vécu et de ta santé mentale, aide grandement à déstigmatiser ce sujet encore de nos jours si tabou. Tu le fais avec tant d’assurance et de transparence…. Tout en restant solide, ne craignant pas le jugement des autres. Tu réalises que tu es un peu une pionnière?

« Il faut en parler. Le nombre de suicides qui sont attribués à des dépressions dont personne n’avait jamais entendu parler autour…. Pourquoi? Parce que la victime de cette maladie mentale-là n’osait pas en parler par peur, culpabilité, par honte….

On ne sait pas à qui s’adresser en termes de santé mentale. Il manque d’accès aux ressources. Qui on va voir? Ça ne tente à personne d’aller passer une semaine dans le corridor de l’urgence psychiatrique. »

Nous avons discuté de l’importance de s’occuper de la santé mentale des gens, des dommages collatéraux en lien avec les gens malades qui n’arrivent pas à obtenir de l’aide et à être soignés. Du fait que la société aurait tout à gagner à investir dans le bien-être psychologique des gens. Que d’intervenir auprès des enfants serait d’une importance cruciale…. Question de travailler avec eux avant que les comportements délinquants se cristallisent, que l’auto-médication par la consommation de produits illicites deviennent une dépendance dont il est hyper difficile de se défaire…. Avant que les problèmes psycho-sociaux s’accumulent et que ces personnes souffrantes se retrouvent dans une sorte de « tourbillon » de problématiques, dans lequel elles arrivent à peine à voir une porte de sortie.

« Avec l’avancement de la science et les recherches, on ne peut plus garder les mêmes préjugés. Elles apportent des preuves irréfutables. Mais les gens vont quand même rester accrochés aux vieilles croyances ou aux vieilles mentalités. La santé mentale c’est encore tabou, mais il faut en parler, il faut aller de l’avant….»
Florence & les médias sociaux….

Crois-tu que le fait d’être aussi « accessibles » partout et en tout temps, ça nous déséquilibre en tant qu’êtres humains?

« Il y a certaines choses que je gère sur mon téléphone et c’est un « plus » dans ma vie. Je suis souvent à l’étranger, donc envoyer des textos, communiquer avec ma fille, avec mon équipe de travail, corriger des trucs qui passent….

Tout dépend de l’utilisation qu’on en fait. Je n’ai pas « Facebook » ni « Twitter » sur mon téléphone. C’est à chacun à de s’imposer ses propres limites par rapport à ça. C’est une question d’équilibre. J’aime bien partager des trucs sur ma page Facebook, mais je ne suis pas tout le temps là-dessus, je ne peux pas prendre ce temps-là…. »
Florence & le yoga….

Tu es prof d’Ashtanga?

« Je l’ai enseigné pendant un an. Ça a été une super expérience, mais je ne l’enseigne plus. Le peu de temps que j’avais pour me consacrer à ça, j’ai décidé de le mettre dans l’écriture. J’en faisais depuis 2009. J’ai fait ma formation dans le but de comprendre les impacts du yoga sur le système nerveux, la perception de la santé mentale par l’Ayurveda…. J’ai enseigné le yoga aux enfants car j’ai constaté les bienfaits que ça a sur eux…. »

Si le yoga pouvait entrer dans les écoles….

« Ça serait extraordinaire! Dans les prisons aussi! Ça permettrait de calmer les fluctuations de l’esprit. Parce que toute violence dans le monde est générée par un esprit qui n’est pas capable de gérer son niveau d’influx émotionnel. Le yoga m’a beaucoup aidé avec mes problèmes d’anxiété et m’a permis de canaliser ma concentration. J’en fais moins maintenant. J’en fais encore, mais là je cours…. Plus j’écris, plus j’ai besoin d’aller courir! L’écriture et le yoga c’est tellement introspectif…. La course c’est ce que j’ai besoin en ce moment. Je m’ajuste toujours à ce que mon corps me demande, j’essaie toujours d’ajuster ce que je fais à la façon dont je me sens.

 

Florence & le quotidien….

À quoi ressemble « une journée » dans la vie de Florence ?

« Mon quotidien change de jour en jour, dépendamment des contrats que j’ai. »

Elle m’explique qu’en bout de ligne, c’est toujours une question de rééquilibrer les choses, que ce soit au niveau de sa carrière, de sa fille, de son couple, de son alimentation, etc…. Tout doit être équilibré. Son temps & son énergie doivent être répartis le plus équitablement possible dans chaque aspect de sa vie. Comme chaque journée n’est pas égale, elle s’ajuste. « On complète, on va chercher ce qu’on peut quand on peut ».

« Je pourrais retomber en dépression si certains évènements de vie m’arrivaient. Certaines choses…. Je ne sais pas si je pourrais les vivre sans retomber en dépression. Je suis alertée à ce fait-là. Ce que je fais c’est que je travaille tous les jours à préserver ma santé mentale. C’est une question de me prioriser, de prioriser mon monde, mon univers, mon équilibre…. De me connaitre. »
L’amour en 3 mots?

« L’intimité, la confiance. Une vision commune de l’avenir, une direction commune. »

Elle m’explique qu’elle et son conjoint actuel travaillent continuellement à nourrir ces aspects de leur relation. Que l’humour est aussi très important pour le couple. Que la communication doit toujours se faire dans le respect.

Qu’est-ce qui te rend heureuse ?

« Je mentirais si je disais que c’est uniquement des « petits bonheurs » comme une crème glacée ou mon café du matin…. Moi je suis heureuse quand j’ai l’impression de savoir exactement « où » je suis. Quand je comprends ce que je fais, pourquoi je le fais, comment j’agis…. Quand je comprends le sens de ce que je fais.

Pour moi, mon métier c’est une belle partie de mon bonheur parce que j’aime vraiment, franchement ce que je fais. Ma relation avec ma fille m’apporte énormément de bonheur. On a vraiment une super complicité. Ma relation avec mon amoureux me rend heureuse. Au fond, c’est dans la richesse de mes relations avec les gens que je me sens heureuse.

C’est un entraînement de l’esprit de trouver des bases, des choses qui nous rendent heureux et auxquelles on peut avoir accès à n’importe quel moment. »
Ton spectacle….

« Il y a 15 nouvelles chansons qui ont été écrites avec Gaëlle et j’ai fait les musiques. Ce sont des chansons qui ont été construites autour de thèmes importants du livre, donc ce n’est pas mon histoire racontée avec des extraits du livre. Je ne parle même pas du livre.

L’important c’est qu’on sente la trajectoire d’émotions du livre à travers les chansons. Ce sont des chansons qui peuvent avoir une vie hors du contexte et c’est important pour moi. L’émotion qu’elles portent est très pure, très brute. Sur scène, je suis au piano, accompagnée de mon guitariste Yves Desrosiers…. Puis il y a des projections de Marie Brassard et Sonoyo Nishikawa.

L’idée c’est de se retrouver à travers ces chansons et de se rappeler qu’on est jamais seuls. Elles ne sont pas endisquées encore. Je leurs donne vie en même temps que le public les découvre, donc elles grandissent sous le public, ce qui est le fun aussi!….»

Ça semble quasiment être une « expérience » vu la manière dont tu me le présentes….

« Écoute, je veux pas mettre la barre haute! C’est un peu ça…. Mais sans prétention. »
C’est un rendez-vous samedi le 28 mai au Capitol de Québec ma chère Florence!